La résilience de l’armée russe, clé de la guerre en Ukraine

Un camion militaire avec la lettre Z, symbole de l’armée russe, à l’entrée de Marioupol (Ukraine), le 12 juin 2022. Un camion militaire avec la lettre Z, symbole de l’armée russe, à l’entrée de Marioupol (Ukraine), le 12 juin 2022.

L’une des principales inconnues de la guerre en Ukraine, alors que le conflit entre dans son cinquième mois de combats, repose sur la capacité d’endurance de la Russie. Une résilience sur laquelle les sources manquent et d’autant plus difficile à évaluer que l’opacité demeure, aussi, autour des capacités militaires ukrainiennes et des livraisons d’armes occidentales.

Officiellement, l’ex-Armée rouge a perdu très peu d’hommes depuis le début du conflit. Son dernier bilan, publié le 25 mars, faisait état de 1 351 soldats tués et 3 825 blessés. Depuis, aucune indication n’a été donnée par Moscou. Selon les analystes, ces pertes seraient en réalité dix fois plus importantes, au minimum. « En quatre mois, l’armée russe a probablement perdu plus de 10 000 hommes, estime Dimitri Minic, chercheur à l’Institut français des relations internationales (IFRI). C’est considérable, surtout dans une armée qui manque d’infanterie. » Certains bataillons russes ne compteraient plus qu’une trentaine d’hommes, contre 600 à 800 en temps normal, affirme le ministère de la défense britannique.

Les dommages sont encore plus importants parmi les supplétifs de Moscou, envoyés en première ligne dans le Donbass. Le 16 juin, les autorités de la « république populaire de Donetsk » (RPD) ont révélé avoir perdu 2 128 militaires depuis le début de l’année, auxquels il faut ajouter 8 897 blessés. Ces pertes représenteraient « environ 55 % » des forces de la république autoproclamée, selon les militaires britanniques, qui soulignent, dans un communiqué publié le 22 juin, « l’attrition extraordinaire des forces russes et prorusses dans le Donbass ».

Pour les remplacer, la Russie disposerait de peu de réserves. Selon les analystes, quelque 200 000 soldats russes et séparatistes sont actuellement engagés dans les combats, ce qui représente une bonne part des effectifs. « 80 % de l’armée russe est déjà en Ukraine. (…) Ils n’ont pas beaucoup d’autres forces à mobiliser, et celles qui le sont ne sont pas professionnelles, pas entraînées, et ne peuvent pas être équipées », estime Kori Schake, directrice de la politique de défense à l’American Enterprise Institute, un think tank américain proche des milieux conservateurs.

Arsenaux hérités de l’ère soviétique

Signe de cette hémorragie, Moscou multiplie les initiatives pour regarnir ses bataillons. Fin mai, la Douma, la chambre basse du Parlement russe, a supprimé la limite d’âge pour s’engager dans l’armée, auparavant fixée à 40 ans. Désormais, tous les citoyens n’ayant pas atteint l’âge de la retraite, actuellement fixé à 61,5 ans, peuvent rejoindre les rangs de l’armée russe. De même, les autorités militaires ont considérablement augmenté les soldes versées aux nouvelles recrues. Le recours aux forces tchétchènes de Ramzan Kadyrov ou aux mercenaires du Groupe Wagner est aussi largement documenté.

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